Marc et le monument

— Bonjour Annette,

Merci de m’avoir lu.

Oui, hier, nous avons été reçus très chaleureusement par des gens qui nous ont fait connaître leur culture, c’était très riche de données et nous retiendrons sans doute ce sens du partage. Moi qui avais dormi trois heures et demie et taillé une heure et demie de route aller, deux heures retour, j’étais honoré par la façon dont nous avons existé, comme tu dis, remis debout.

Toute la culture de son pays et des ancêtres autour d’un monument aux morts réalisé par mon grand-père (qui a créé notre lien, avec la volonté de Marc, l’ami qui nous a reçus avec et chez sa maman), nous baignons dedans, non pas comme des touristes par un échange commercial, mais par une volonté d’être assimilés à cette culture, cette famille, c’était chaleureux et tellement inhabituel que ça pouvait en être troublant.

Marc, très intéressant, car tout avait du sens, comme tu dis, nous a remis debout par ses cadeaux de connaissances, mais la route et le peu de sommeil nous ont mis à plat pour aujourd’hui.

La culture de ce bel après-midi qui s’annonce sera de profiter de la simple beauté de la nature environnante d’ici.

J’écourte pour aujourd’hui, restant imprégné des paysages mais aussi des « bruits » que nous avons captés pendant quatre heures de petite voiture peu sécurisée.

Mille bisous, Annette, j’émerge doucement d’une longue nuit de récupération, te réécrirai, mais te rassure, le livre, si je l’écris, sera moins rébarbatif à lire ou écrire.

Marc, je te confie ce texte comme un échange d’un tout petit réseau d’amis de confiance, parce que « les copains-copines d’abord ». C’est du Dadu, l’idée-aliste tout craché.

À Annette, que tu gagnerais à rencontrer en tant qu’humaine, dans tous les sens nobles du terme :

« Je te relis et la journée d’hier était bien cette journée debout.

Dans la dernière ligne, tu parles d’incohérences qui donnent du relief, c’est bien le mot, chaque individu dans les groupes, chaque groupe dans les groupes a sa cohérence à lui, qui ne l’est plus pour un autre, dominant par un autre rapport qui fonctionne sur d’autres valeurs.

En mathématiques, cela se résume par des axiomes différents qui mènent à des conclusions différentes, jugées par les valeurs des autres (axiomes des autres) comme incohérentes car divergentes. Pour moi, chaque individu, chaque culture a Sa cohérence, il faut connaître les axiomes des autres pour comprendre leurs raisonnements.

L’exemple parlant d’hier est celui de la préservation du patrimoine : il y a des routes, des gués gaulois que nous avons devinés, il y a cette ferme et ce monument aux morts qui vont sans doute se trouver sur une quatre-voies moderne : comme aller dans le sens du développement durable en respectant ceux qui ont donné leur vie pour la liberté d’un peuple, d’un continent, d’un monde, de notre planète face au nazisme déshumanisant ?

Nous sommes à l’heure du numérique comme des routes quatre-voies pour des intérêts individuels d’industriels. Les photos que garde Marc, la maquette que nous avons apportée, tout cela garde du sens à ce monument même s’il était déplacé, voire remplacé par sa maquette, qui ne doit pas être cachée comme font les églises s’appropriant l’histoire de l’humanité, comme un Graal.

Pour moi, par les liens noués, la mémoire peut-être un jour écrite de Marc par Marc, tout cela peut conserver tous ces axiomes, ces identités humaines ou matérielles. Jusqu’à ce côté « bavard » vu de l’extérieur, moi, je dirais plutôt passionné, aimant, authentique de Marc. Car il a raison, carpe diem, la vie peut s’arrêter n’importe quand, il y a tant de choses à dire, retranscrire pour ne perdre que l’inutile (s’il y a ?), moi, je crois comme lui qu’il faut tout garder pour tout redire, le vocabulaire, les outils s’enrichissant. 

Je dirais comme Marc sur le « je », « Nous sommes des êtres sociaux qui devrions, comme les Asiatiques, garder notre cohésion », j’ajoute: par le souvenir de nos cohérences. Je compte aujourd’hui faire de cet écrit un « on ».

 

Bises. »